Christian Belluard



Née à Quimper en 1943, elle décide à quinze ans de devenir peintre.

Sans jamais se soucier d'apprendre le dessin ni la peinture, de travailler sur nature, sur des modèles, sur des thèmes, etc, elle applique dès ses premiers pas cette formule de Picasso qu'elle ne connaissait pas à l'époque « Je ne cherche pas, je trouve ». C'est l'imaginaire qui décide. Le sujet, la composition, la technique... ces questions ne se posent pas ! le dessin semble exister préalablement. La main le transpose sur le papier sans hésitation ni remords. Tout ça ne fait pas l'affaire de parents qui rêvaient d'une carrière d'institutrice. On l'inscrit pour le professorat de dessin aux Beaux-Arts de Rennes où elle n'assiste qu'à quelques cours. Un médecin, belluardcar on est nécessairement malade si l'on veut être artiste, qui plus est, sans rien apprendre, conseille de l'envoyer en Mayenne chez le peintre Robert Tatin qui a besoin de main d'œuvre bon marché pour construire son musée insolite. Elle y séjournera par intermittence pendant dix ans. Par manque de moyens, elle ne produit que des gouaches, des dessins à la plume et quelques toiles peintes à l'huile.

En 1978, elle découvre le pastel gras dont la rapidité d'exécution lui convient mieux. Les vraies expositions commencent à cette époque. Dans la célèbre galerie de Cérès Franco, « l'œil de boeuf », où elle expose en 1980 et 81, elle rencontre Eliane Larus qui l'entraîne dans son groupe « Pixture » avec Stan Nitkowski et Alain Lacoste. Elle participera à plusieurs salons de la « Jeune Peinture » et de « Figuration Critique ».

Elle exposera en Belgique et en Allemagne mais, !es voyages. les villes, la foule des vernissages, les peintres, les marchands, c'est trop. Elle préfère la création solitaire, la nuit, dans sa maison isolée de la campagne bretonne. En dehors des pastels à l'huile et des toiles, elle a réalisé des «cairns» assemblages de pierres peintes empilées et, depuis peu, elle travaille à l'acrylique sur des planches de bois dont elle décore les cadres.

« Janvier au sourire d'hiver », « la vanité poursuivant la vieillesse », « petit sourire, petit plaisir », « la porte fermée », « l'idiote », « la brute », « les petits champignons », autant de titres d'œuvres dont le centre est un personnage, visage, buste, portrait en pied, souvent entouré d'attribut divers, animaux, plantes ou objets imaginaires. A chaque fois, tout est différent. Innombrables sont les représentations de l'unique vérité, Tout vient du tréfonds de l'âme. là où le terrible n'exclut pas la tendresse. On est plus près des visions d'un Ezéchiel que des impressions d'un Renoir. il faut avoir en vue le statut métaphysique de l'Imagination d'un Ibn Arabi ou d'un Jacob Boehme. Comment dire l'indicible, comment montrer l'ineffable ? C'est toujours une épreuve. Les images ne se dévoilent qu'au prix d'une lutte ardente . avec l'Ange, ont prétendu certains . une grande dépense de vie où physique et psychique sont intimement liés.

Et la douleur, si présente.

Christian Belluard. 1993.

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